Y aurait-il une prédisposition à être victimes de manipulateurs pervers narcissiques?
Ce propos doit être nuancé…
Ce point est essentiel à comprendre pour mieux se protéger, se reconstruire et, le cas échéant, aider nos enfants à se prémunir de la toxicité de certains individus.
Force est de constater que nous vivons dans un monde en perpétuelle crise et que, pour y survivre peut-être, beaucoup usent de leurs influences pour se protéger. La manipulation perverse semble bien devenir un moyen efficace pour s’imposer aux autres, vus ici comme rivaux, et offre le bénéfice d’échapper à une remise en question personnelle.
Le profil psychologique des victimes que je rencontre au quotidien semble caractérisé par une certaine fragilité émotionnelle, un manque de confiance en soi, une mauvaise image de soi, et d’un sentiment d’impasse, voire d’impuissance. Je note également une configuration récurrente: celle d’un choc émotionnel précédent la rencontre perverse. Cet état d’être intérieur et profond tend à faire émerger une peur, consciente ou non, de l’abandon, du rejet, de la solitude. Cette conjoncture amène la « proie idéale » à un état d’hyper-empathie qui aura tendance à l’inciter à donner vie à ses rêveries rassurantes et à idéaliser la rencontre.
Ces éléments constituent les failles qui rendront possible l’attraction comme la captation perverse
En me basant sur l’écoute attentive et l’analyse de centaines de victimes de pervers narcissiques, j’ai pu isoler ce qui me semble être les causes premières qui font qu’une personne, homme ou femme, pourra non seulement tomber, mais surtout s’enliser dans le piège du manipulateur pervers narcissique.
Ma pratique thérapeutique d’accompagnement des victimes m’incite à croire que tout le monde, ou presque, peut un jour ou l’autre être approché, voir accroché par une ou un manipulateur pervers narcissique, que ce soit dans la vie privée, sociale ou même dans le cadre du travail. Mais j’ai également pu observer que tout le monde ne s’enlise pas, ou pas longtemps, dans l’emprise perverse. Pourquoi?
Descendons de notre licorne pour regarder la réalité en face.
Modèle de reconnaissance de la victime du manipulateur pervers narcissique ©
- Mauvaise image, et estime de soi
- Instabilité émotionnelle
- Peur du rejet, de l’abandon et de la solitude
Ces peurs viennent de la construction individuelle de la personne potentiellement victime d’une ou d’un pervers narcissique. Une mauvaise estime et image de soi, associé à une instabilité émotionnelle amènent à des comportements qui séduiront les profiteurs.
Les personnes ayant ce socle de personnalité fragile et instable auront une nette tendance à l’hyper empathie, à bien différencier de l’empathie, et apporteront une trop grande sa confiance dans l’autre qui séduit. Le séducteur ou la séductrice vient effectivement apporter, le temps de la mise sous emprise, le réconfort et la réassurance nécessaire.
Mais ces failles profondes ne suffisent pas nécessairement.
J’ai pu constater avec une récurrence qui m’incite à y voir un schéma répétitif, que la personne qui tombe dans les griffes du manipulateur pervers, se trouvait également dans une période fragile de sa vie. Un deuil, une rupture, un licenciement ou tous autres drames de l’existence plongent la victime potentielle dans un besoin impérieux de trouver l’épaule sur laquelle poser sa tête, ne fût-ce que le temps de reprendre son souffle.
C’est là bien évidemment que le « sauveur » providentiel arrive, tel un chevalier sur son blanc destrier.
Naïve peut être, en manque d’affection sûrement, par peur du rejet, de l’abandon ou/et de la solitude, la victime va s’efforcer de croire tout ce qui lui sera promis.
Il est peut être difficile d’accepter que c’est nous même, soutenu par notre imagination et nos désirs immatures, qui allons donner forme au monstre qui nous submergera par la suite. Et pourtant, sans cette prise de conscience majeure, le changement n’est pas possible.
On lit souvent que le pervers narcissique ne peut « changer », à l’inverse de la victime, qui, mue par son besoin compulsif de se remettre constamment en question en a la possibilité. C’est mon avis, et c’est pourquoi je propose d’accueillir ce que mon expérience professionnelle et personnelle m’a mené à comprendre afin de vous aider, non pas à « changer », terme que je trouve inapproprié, mais à « évoluer » sainement.
Mais pourquoi donc certains, certaines tombent dans ce piège mortel alors que d’autres n’y prêtent aucune attention ? Pourquoi voit-on des femmes, plus rarement des hommes, répéter encore et encore l’enlisement dans des relations hautement toxiques et perverses alors que d’autres reprennent leur vie en main de manière constructive? Pourquoi, pourquoi, pourquoi moi ?
Vous vous demandez pourquoi vous avez fait l’expérience d’une, ou même de plusieurs relations avec un ou une personnalité manipulatrice perverse narcissique.
Vous aimeriez comprendre pourquoi le manipulateur pervers qui vous a mise à genoux, n’agit pas, en apparence du moins, de la même manière avec d’autres personnes.
Vous voulez comprendre où se trouve l’origine de votre problème.
Bravo ! Ce sont d’excellentes questions ! C’est le premier pas essentiel vers une inflexion positive du cours de votre vie.
Prenons soin de rechercher nos réponses au bon endroit.
Certains pourront se dire: « Ma question à moi est: Comment fait-on pour se débarrasser de ce passé douloureux ? ». D’autres diront: « Comment faire pour détruire tous les pervers narcissiques ? » Certains pourront même affirmer que c’est à cause de leur enfance, ou à cause de ceci ou de cela qu’ils sont devenus pervers narcissiques, risquant alors de justifier leurs comportements toxiques.
Attention, c’est un piège !
Tant que vous recherchez la cause de vos tourments, quels qu’ils soient, à l’extérieur de vous-même, vous allez vous égarer et augmenter le risque de prolonger, voir même de reproduire indéfiniment ce schéma de souffrance.
Les meilleures questions à se poser sont:
« Qu’y a-t-il en moi qui me fasse plonger dans les pièges de séduction du manipulateur pervers et qu’est-ce qu’il y a en moi qui les attirent autant ? »
Et, question probablement plus difficile encore:
« Qu’est-ce qu’il y a en eux qui m’attire autant vers eux ? »
Témoignage:
Vanessa se confie: « Je suis responsable d’avoir cru à ses belles paroles et d’avoir été sotte au point d’imaginer que de telles personnes puissent exister et également totalement naïve de penser pouvoir le sauver! J’ai cru le changer et lui donner la famille qu’il n’avait jamais eue contrairement à moi. J’ai compris que je ne suis pas une Wonder Woman et que je n’accepterai plus tout et n’importe quoi par « amour ». J’apprends aujourd’hui à dire non! et à m’imposer. Je ne veux plus modifier la personne que je suis en continuant d’aider constamment les autres et je n’accepterai plus tous et n’importe quoi. Il ne changera jamais il restera ce qu’il est. »
Notre passé appartient au passé mais il contribue à faire de nous ce que nous sommes aujourd’hui. Avec courage, apprenons les leçons de nos expériences.
Prenons notre passé comme un tremplin qui nous aide à mieux vivre le présent et à nous propulser vers un futur meilleur et non pas comme un boulet que l'on traîne et que l'on fait reluire indéfiniment!" Geneviève Schmit
Geneviève SCHMIT Tweet
Notre passé est la source de nos potentiels positifs comme de nos failles actuelles. Il est la somme des circonstances de vie et de nos choix. Evitons de reporter toute la « faute » sur nos parents ou sur un tiers. Il est possible qu’à leur place, dans les mêmes circonstances, à leur époque et avec le même passif personnel, leurs forces et faiblesses, leurs contraintes, nous n’aurions pas fait mieux.
"Le présent n'est pas un passé en puissance, il est le moment du choix et de l'action."
Simone de Beauvoir Tweet
Rechercher exclusivement le coupable ailleurs, nous fige dans une position d’impuissance qui empêche toute évolution positive.
Cette prise de conscience fait immanquablement sortir la personne de la position, parfois confortable mais pourtant redoutable, de « victime« .
C’est en sortant de la posture de victime que la personne concernée entre dans la puissance du choix.
En dehors des empreintes laissées par le passé, certains tempéraments semblent plus propices que d’autres à la mise sous emprise perverse, soient enclin à l’addiction que d’autres.
Le passé a formé le présent, et donc oriente l’avenir, mais la solution n’est pas dans le passé, elle est dans les choix présents !
En dehors des personnalités sensibles aux nombreux charmes du manipulateur narcissique, il y a celles qui ont été broyées par la vie et qui tentent désespérément de lui donner un nouveau souffle, de croire que le bonheur à deux reste encore possible. C’est comme un défi à une existence qu’elles ne maîtrisent pas, celui d’avoir une relation hors du commun et de la montrer au reste du monde.
Dans ce jeu fatal de séduction on ne peut que perdre son âme. Nous vivons aujourd’hui dans une société régie par le culte du paraitre, il ne sert à rien de le nier. Facebook, et les réseaux sociaux sont là pour nous le rappeler à chaque instant.
Il y a un grand écart entre l’existence que l’on expose aux yeux de tous, que l’on met en scène quelquefois et celle que l’on vit dans la réalité parfois fade du quotidien. Au regard de ce que nous offrent à voir les réseaux sociaux, il faut susciter l’envie ou attirer la sympathie par l’exposition de nos malheurs. La nature même de ces liens virtuels, amène à des comportements totalement narcissiques.
Témoignage:
Pourquoi ? Je n’ai pas rencontré quelqu’un de normal !! Toujours des reproches, je dois me remettre en question, m’améliorer dans certaines tâches, l’idolâtrer. Anonyme sur mon groupe de victimes Facebook
Témoignage:
Elisa témoigne: « J’ai pris conscience il y a peu de ma responsabilité dans ce que je vivais. C’est le chemin que j’ai pris depuis peu, malgré ses horribles actes et paroles qui ne concernent que lui. C’est une personnalité perdue et insatisfaite. Il est toxique pour moi qui suis dans ce que j’appelle la « régularité ». Je crois même qu’il est mon propre miroir, le miroir de mes frustrations, de mes hésitations, de mes croyances, de la foi que j’ai donnée à ses promesses et qu’il ne pouvait tenir, je le savais. Il est responsable de ses actes, et moi je suis responsable de mes réactions à ses actes. Pourquoi autant pardonner ? Pourquoi pardonner l’impardonnable alors même que je savais qu’il n’allait ni s’excuser, ni tenter de se faire pardonner? J’ai remplacé une souffrance par une autre. J’ai remplacé la souffrance d’être séparée de lui par la souffrance d’être trompée, trahie et tout compte fait, de ne pas compter pour lui. Je suis consciente que souvent j’ai mal réagi à ce qu’il m’imposait. Peut-être était-ce par déception, par fatigue ou lassitude de l’éternel recommencement du cycle séduction/promesses/mensonges/trahisons. »
Finissons-en avec le culte de l’oie blanche persécutée, irresponsable et naïve! Sortons de l’état de victime pour devenir stratège de notre vie. Reprenons notre pouvoir en main et choisissons ce qu’il y a de mieux pour nous-même, en rapport avec nos propres valeurs et projets de vie! Je ne perçois pas le plaisir à prétendre être naïve et niaise, si ce n’est celui d’utiliser ce comportement victimaire[1] pour profiter de ses bénéfices secondaires[2]. Même si cela a tout son sens durant une première période, cessons de nous égosiller sous l’étendard, symbole de ralliement des victimes de pervers narcissiques. Ce n’est pas une noble cause. Je crois bien plus en celle du respect de soi-même, de l’enseignement reçu par l’expérience vécue et de notre responsabilité face à ce qu’on en fait; de préférence le choix de la vie pour soi et pour nos enfants.
Témoignage:
« Je vois certains avantages à la posture de victime. Oui j’en vois certains comme celui de rester dans sa zone de confort et cela même si elle apporte des souffrances. C’est celle qu’on connaît or l’inconnu fait peur. Le bénéfice secondaire peut aussi être de continuer à être pris en charge par quelqu’un de toxique certes, mais meneur. Ce peut être aussi de ne pas assumer SES propres responsabilités et de faire SA vie selon ses propres valeurs. Il peut sembler plus facile de se laisser porter par les autres, et même par des groupes de victimes ou de soutien… »
Témoignage:
Virginie, 64 ans témoigne: « Aujourd’hui je suis MOI et je ne suis plus disposée à accepter tout et n’importe quoi par peur de la solitude. Je pense que si l’on n’est pas content, on passe son chemin. Et comme je suis quelqu’un qui assume, j’accepte toutes les conséquences de ce changement. Tant pis, ça passe ou ça casse. Pourtant, je n’ai pas de proches, si ce n’est un « mari enfant » de 70 ans sur lequel je n’ai jamais pu m’appuyer. Il n’a aucune empathie à mon égard et son caractère est très difficile. Il ne fait que ce qui l’arrange et est totalement centré sur lui-même. C’est un narcissique. Cela fait des années que je me débrouille seule. Si je veux de l’aide, il me faut payer une personne pour cela. Heureusement j’ai des amis et mon frère pour parler. Il était temps d’agir pour moi, j’ai 64 ans! »
Geneviève SCHMIT, 2 juillet 2018
(Extrait d’un manuscrit Modèle de reconnaissance du pervers narcissique’ éd. Grancher)
[1] Victimaire: Se dit d’une personne qui se croit victime de la société et qui réclame des réparations.
[2] Bénéfices secondaires: Conséquences positives pour l’individu de l’expression des symptômes d’un état ou d’une maladie. C’est une notion issue de la psychanalyse qui veut que l’expression du symptôme permette une réduction des tensions internes. Elle est reprise en thérapies comportementales et cognitives sur une interprétation des conditionnements. Il s’agit alors de l’ensemble des bénéfices qu’un individu peut connaître par son état pathologique. Ce peut être au niveau des interactions sociales (plus l’attention lui est portée mieux il se porte), au niveau financier (versement d’allocations, Pretium doloris, dédommagements), au niveau comportemental (évitement de situations redoutées ou à l’inverse, accès à un comportement agréable), etc. … Les bénéfices secondaires ne sont pas à considérer comme des causes des symptômes, mais comme des facteurs de maintien dont il faut tenir compte pour que les thérapies soient efficaces.
[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Hypersensibilit%C3%A9_(psychologie)
[2] https://www.reussitepersonnelle.com/victimisation/
[3] Le terme clanique est utilisé pour faire référence à tout ce qui a un lien avec la notion de clan, c’est-à-dire un groupe de personnes réunies autour d’un chef, partageant les mêmes valeurs, parfois de la même famille.
[4] Ginette Plante, auteur, conférencière et formatrice
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8 Commentaires
Merci beaucoup. Il faut s’avouer à soi-même notre très grande valeur, notre très grande générosité, notre très grande beauté intérieure, notre très grande délicatesse, Notre Grandeur D’Âme, Notre Intelligence Supérieure, Supérieure car Emanation Directe de Notre Conscience Divine et s’affirmer en tant que JE, s’affirmer en tant que MOI-JE, affirmer NOTRE EGO, NOTRE MOI, notre DROIT à l’EXISTENCE. La Terre-Mère exige un Retour à l’Equilibre. Ne plus se laisser marcher dessus. Ne plus se laisser étouffer par qui que ce soit ou par quoi que ce soit. Revenir à SOI-MÊME. Pouvoir Enfin Se Dire à Soi Au Creux de Son Ventre à Soi Au Creux De Sa Propre Intimité Sacrée: Oui. Oui Je M’Aime. Oui Je Me Respecte. Oui Je Suis Libre. Et Ce N’Est Pas Négociable. Point Final.
Re bonjour
Moi je n’arrive pas à comprendre pourquoi l’on dit que l’on est sous emprise
on pourrai nous dire que nous le choisissons d’etre sous cette emprise, personne ne nous oblige à rester, obeir, nous ne sommes pas obliger d’accepter et pourtant on choisi de le faire, on pourrai nous dire que nous avons un probleme pour accepter tout cela
Bonjour.
Il faut peut-être ajouter en parallel au « modèle » type de la victime, le fait qu’elle est sans doute, je pense, malheureusement inconsciente de son état de faiblesse en ses circonstances vis-à-vis du prédateur.
(et, à la place de « … voir accroché … », j’aurais plutôt utilisé harponné ou ferré.
Très judicieux, Merci
Bonjour, peut ton devenir bi polaire ou etre atteint de la maladie bordeline à force de l’emprise d’un PN?
MERCI
Bonjour,
C’est une question à poser à un médecin psychiatre. Je ne peux vous répondre.
Bon courage, Geneviève SCHMIT
UN GRAND MERCI je viens de comprendre pourquoi je suis retombée dans le panneau pour la seconde fois et je pense que cela va beaucoup m’aider à me prendre en charge et ne plus me laisser berner; 2 fois de souffrances pour s’éloigner de ces personnes c’est usant merci à vous namasté
Merci pour ce témoignage de reconnaissance !
Geneviève SCHMIT